Notre lettre 875 publiée le 20 juillet 2022

LA SUPPRESSION INIQUE
DE LA MESSE TRADITIONNELLE
A MONTMIRAIL

LE CRI DE REVOLTE DES FIDELES


En vertu du décret publié le 21 juin dernier par Mgr le Saux, avant son départ précipité du diocèse, concernant l’application du motu proprio Traditionis custodes dans le diocèse du Mans (voir notre Lettre 870 du 29 juin dernier), la messe célébrée par l’Institut du Bon Pasteur à Montmirail, desserte historique de la messe tridentine, est censée s’interrompre à la fin du mois d’août.

C’est la 3ème fois au moins (1995, puis 2011, avec une tentative au milieu des années 2000) que le diocèse essaie de mettre fin à cette messe, qui a toujours résisté contre vents et marées.

Montmirail se trouve situé à l’est de la Sarthe, 15 km au sud de la Ferté-Bernard (ligne Le Mans – Nogent le Rotrou – Chartres), limitrophe de l’Eure-et-Loir. En 1959 y fut nommé un curé natif de St Servan en Bretagne, l’abbé Joseph Rouxel, né en 1921, qui refuse la nouvelle messe et reste curé de ce village perdu jusqu’à sa mort en 1995.



Après une première tentative de suppression de la messe par le diocèse, la messe est reprise en 1995 par la Fraternité Saint-Pierre (avec un desservant historique, resté 10 ans, l’actuel chanoine Fournier, au DAF, ex-aumônier des pompiers de Paris au moment de l’incendie de Notre-Dame, sauveur des saintes reliques conservées à la cathédrale). Mais la FSSP décide d’abandonner cet apostolat en 2011. Les paroissiens appellent alors l’abbé Laguérie à la rescousse (Courtalain est à 30 km à travers Beauce) qui obtient après une mobilisation la desserte pour l’IBP.


L’IBP avait signé une convention en bonne et due forme avec le diocèse. Pour justifier aujourd’hui la fin de la messe, le diocèse justifie sa rupture unilatérale par deux motifs :

·  Le prêtre desservant de l’IBP ne se rendrait pas aux réunions du doyenné. En fait, lorsqu’il a demandé à y aller, cela lui a été refusé. Interrogés par la présidente de l’association de soutien, le 13 juillet dernier (voir plus bas), le prêtre responsable de l’application de Traditionis custodes dans le diocèse, accompagné de l’ex-vicaire général nommé en 2021, n’a su que dire.

·  Selon l’évêque, l’IBP ne tient pas les mêmes propos sur le concile Vatican II devant lui et sur le web, mais est incapable de citer les propos qu’il juge inacceptable sur le Concile. 

La situation est donc la suivante :

·  Une association extrêmement motivée, présidée par la nièce de l’abbé Rouxel, Bénédicte Rouxel, qui représente les fidèles concernés par les célébrations de Montmirail, a demandé à être reçue par les autorités ecclésiastiques.

·  L’entrevue a eu lieu le 13 juillet, entre la présidente de l’association, dont on avait exigé qu’elle se présentât seule, d’une part, et le prêtre référent de l’application de Traditionis custodes, accompagné de l’ancien vicaire général, véritable gérant du diocèse sous Mgr Le Saux. Rendez-vous de pseudo « écoute » sans résultat, comme on le verra dans l’entretien qui suit.

·  Or, seul Montmirail bénéficie encore d’une messe dominicale régulière au sein de tous les villages avoisinants, dont les maigres troupes de pratiquants se retrouve à la Ferté Bernard. (On notera à ce propos que, dans son audition récente au Parlement, Stéphane Bern a indiqué que 2 à 3000 églises françaises, désaffectées de fait, sont en péril à court ou moyen terme, au sein de la ruralité, la charge de leur entretien est trop lourde pour les seules communes ou les habitants).

·  En revanche, dans ce village, qui ne compte plus que 300 habitants plutôt âgés contre 600 à l’époque de l’abbé Rouxel, les fidèles réguliers sont encore une trentaine.



·  L’enracinement local est profond : cette desserte historique, où il n’y a jamais eu que la messe tridentine, est soutenue par la municipalité, qui apprécie le fait que l’église reste vivante et entretenue et a organisé certains travaux.



·  l’IBP a fait le recours canonique classique auprès de l’administrateur apostolique (Mgr Le Saux, ex-évêque du lieu) contre la décision de suppression, recours suspensif de manière à continuer la célébration aussi longtemps qu’il n’y aura pas un nouvel évêque pour trancher le litige. Mais personne n’accuse réception du recours (voir entretien plus bas).

·  Les fidèles ont donc la ferme intention de continuer à se mobiliser face à des autorités « pastorales » qui les ignorent et veulent les faire disparaître.


Nous avons posé quelques questions à Bénédicte Rouxel, présidente de l’association des fidèles de Montmirail.



Quelle est l’histoire de la messe tridentine à Montmirail ?

La messe tridentine a toujours été célébrée dans l’église de Montmirail.  En 1995, à la mort du doyen Rouxel (prêtre diocésain resté fidèle à la messe tridentine), l’évêque du Mans Mgr Gilson est allé ressortir de la maison de retraite des vieux prêtres, un prêtre âgé qu’il a nommé curé de Montmirail afin qu’il célèbre dans le nouveau rite. Les fidèles se sont alors unis en association (« association abbé Joseph Rouxel ») pour réclamer un prêtre célébrant la messe tridentine.

Au bout de 6 mois, en janvier 1996, Mgr Gilson a nommé un prêtre de la Fraternité Saint Pierre à Montmirail (l’abbé Jean-Marc Fournier). Cela, bien sûr, grâce à la Providence, mais vraisemblablement aussi parce que l’évêque craignait que ne se reproduise à Montmirail ce qui s’était passé à Bouloire quelques années auparavant.

En effet, à Bouloire, le doyen Pêcha était également resté fidèle à la messe tridentine, mais cette paroisse étant plus grosse et nettement plus près du Mans, l’évêque avait décidé de changer le curé. Il a organisé une réunion à Bouloire pour venir expliquer aux fidèles les raisons de ce changement. Les habitants de Bouloire, pourtant peu pratiquants, se sont déplacés en nombre et n’ont pas hésité à huer l’évêque qui a dû quitter précipitamment la réunion par une porte dérobée.

Plusieurs prêtres de la Fraternité Saint Pierre sont se succédés à Montmirail jusqu’en 2011, date à laquelle les supérieurs de l’époque (l’abbé Berg et l’abbé Ribeton) ont décidé d’abandonner Montmirail car ils souhaitaient un apostolat au Mans… Nous nous sommes alors tournés vers l’Institut du Bon Pasteur, et l’abbé Laguérie a obtenu de Mgr Le Saux, en septembre 2011, l’apostolat de Montmirail. Il vient de le leur retirer précipitamment avant de partir pour Annecy. L’IBP doit avoir quitté Montmirail au 20 août prochain.



Dans le même temps, comment évoluaient les paroisses environnantes ?

D’année en année, le nombre de curés diminuait, ce qui fait que ceux qui restaient devaient desservir de plus en plus d’églises. Dans certains endroits, la messe n’est célébrée qu’une, deux ou trois fois par an… Pour parfois un ou deux fidèles.


Que ressentez-vous avec le nouveau décret de Mgr le Saux qui raye ce lieu de célébration de la messe et des sacrements tridentins de la carte, et ce juste avant de partir à Annecy ?

D’abord une profonde injustice. Qui est-il pour confisquer et supprimer ce trésor de l’Eglise qu’est la Liturgie ? Trésor qui ne lui appartient pas, mais qui est la richesse appartenant à chaque membre de l’Eglise.

Ensuite la déception d’avoir été trompés… Notre Association a rencontré Mgr Le Saux a plusieurs reprises (au moins 5 ou 6 fois). A chaque fois, cela se passait dans le respect et, du moins en avions-nous l’impression, dans une confiance et une compréhension mutuelles…

Nous nous apercevons également que cet évêque n’est qu’un pleutre: ni lui ni personne de son entourage nous a mis au courant de ces décisions, nous les avons apprises sur internet. Puis, à peine avons-nous découvert cela que nous apprenons qu’il quitte Le Mans…


Que va faire l’ibp pour maintenir cet apostolat ?

L’IBP a déposé un recours auprès de l’évêque pour non-respect des clauses figurant dans la Convention signée entre l’IBP et l’évêque du Mans. Ce recours étant suspensif, il ne pourra être traité que par l’évêque en titre. Il faudra donc attendre la nomination du prochain évêque.

L’IBP a également demandé un rendez-vous avec l’administrateur diocésain (Mgr Le Saux jusqu’au 20 août).


Quelles sont vos démarches auprès de l’évêché et avez-vous le sentiment d’être écoutés avec bienveillance ?

Nous avons demandé à rencontrer l’abbé Benoît Pierre, «délégué chargé du soin pastoral des prêtres et des groupes de fidèles célébrant selon le missel de 1962 » (cf. décret de Mgr Le Saux). Rendez-vous pris pour ce mercredi 13 juillet à 17h. Je vous tiendrai au courant et vous dirai si nous avons été écoutés avec bienveillance.


Suite de l’entretien après la réunion du 13 juillet :


Comment s’est déroulé ce RDV ?

On s’attendait à ne pas avoir été entendus et on n’a pas été déçus. L’abbé Benoît Pierre était accompagné de l’ex-vicaire général nommé en 2021. J’y étais seule – ils ont insisté pour que je ne sois pas accompagnée, j’ai posé des questions auxquelles ils n’ont pas répondu, et après ils ont dit « on veut vous accompagner pour appliquer Traditionis custodes », pour toute réponse.

Cela a aussi été un festival de mauvaise foi – par exemple, quand je me suis émue que le décret est paru alors que Mgr le Saux allait partir pour Annecy, on m’a répondu « c’est une coïncidence ». De même, quand j’ai demandé s’ils avaient reçu le courrier avec accusé de réception de l’IBP, qui est suspensif, ils m’ont dit que le courrier était arrivé sur le bureau de l’évêque, mais qu’ils ne l’ont pas ouvert, vu que l’évêque était malade – mais cela ne l’a visiblement pas empêché de célébrer à Solesmes l’installation du nouvel abbé, où il peinait à faire les répons en latin Novus ordo – peut-être devrait il venir un peu plus souvent à Montmirail…


Alors que le Pape parle d’évangéliser les périphéries, que pensez-vous de l’abandon, de fait, par votre diocèse, des périphéries comme Fresnay sur Sarthe l’an dernier et Montmirail cette année ?

Je pense que c’est scandaleux ! Montmirail est un tout petit village situé à la limite du diocèse. Parmi les fidèles, certains sont très âgés : par exemple un monsieur de 100 ans (qui fut chantre pendant des décennies) vient seul à la messe avec sa canne. Comment va-t-il faire s’il n’y a plus de messe ?

Nous sommes vraiment à la périphérie du diocèse. Nous devrions plaire…On nous répond que nous ne sommes pas les périphéries dont parlait le Pape – nous sommes pourtant au fin fond du diocèse, loin de tout, mais cela n’est pas suffisant pour eux. C’est bien la preuve que nous nous heurtons à des idéologues, non à des pasteurs remplis de zèle pour les brebis qui leur sont confiées… Jusque-là nous savions que nous n’étions pas aimés, nous prenons conscience aujourd’hui que nous sommes ignorés, que nous n’existons pas à leurs yeux… Nous nous attendrions à ce qu’au moins ils nous respectent… mais même pas !


Pour en savoir plus : https://montmirail-tradition.com/

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